Le 10 janvier, le pape François recevait une cinquantaine de responsables du Congrès Mission. Un encouragement net et précis et chaleureux à poursuivre nos efforts en vue de la ligne d’horizon de Bercy.

 

Le matin du 10 janvier, le ciel est lumineux et la ville de Rome calme et presque déserte. Notre groupe est le seul à se blottir devant la basilique Saint-Pierre. Avoir rendez-vous avec le pape est un privilège rare et les responsables du Congrès Mission en ont conscience.

Nous sommes tous des novices, hormis Anne-Geneviève Montagne et Raphaël Cornu-Thenard, qui ont déjà rencontré François en audience privée le 14 novembre 2020. Les chanceux ont décidé de partager.

Certains, comme moi, ont l’impression d’avoir gagné au loto. La providence donne souvent ce sentiment d’être comblé au-delà de notre imagination – même quand elle est débridée.

L’heure tourne et notre groupe doit s’approcher de la fameuse porte de bronze et des gardes suisses aux plumeaux rouges. Comment ne pas être frappé par cette atmosphère de majesté vaticane, rehaussée par la magnificence tranquille de l’architecture ?

Après la porte de bronze, l’escalier de Pie IX et la cour Saint-Damase… On a tous l’impression d’être au cœur de la turbine de l’Église. Un cœur silencieux qui pulse au rythme d’une énergie invisible.

Les amateurs d’histoire religieuse sont aux anges. Nous foulons avec nos petits pieds le palais de Sixte Quint. Les plus curieux lèvent la tête vers le dernier étage qui remonte à Clément VIII (1592-1605). Les spécialistes vous diront que cet accès fut réalisé par l’architecte Maderno vers 1619.

On a le souffle coupé devant tant de beauté et aussi en empruntant l’escalier mirifique qui nous rapproche du pape et de la salle du consistoire.

Nous pénétrons éblouis – et certains mal réveillés – dans cette immense salle du consistoire au plafond en bois doré et sculpté. Nous sommes comme hors du temps. Ou alors c’est le kairos, le temps favorable de Dieu.

Et puis commence une longue attente. Le pape a rendez-vous avec d’autres Français, dans une autre salle du palais, des frères et sœurs du diocèse de Chartres. Les Français sont partout ce matin.

Le regard flâne dans ces espaces démesurés. On tombe sur une image de saint Jean-Baptiste. C’est de bon augure pour les cinquante responsables du Congrès Mission.

Raphaël Cornu-Thenard a l’impression d’être à la maison. Rome, sweet home. « S’il manque des chaises, vous en prenez ! »

Pour passer le temps, les participants se mettent à prier. « Viens, Esprit Saint ! » La louange improvisée s’envole, légère comme une plume. « Je veux te louer, te bénir, t’adorer, éternel est ton amour. »

Après un temps de silence, un participant déclare, inspiré : « Seigneur, donne-nous l’amour de l’oraison. » Un autre : « J’ai l’image d’une colombe qui arrive au-dessus d’un stade. » Ce dernier doit parler de Bercy, imagine-t-on. « La colombe ne sait pas par où rentrer. La vie vient avec cette colombe. »

La providence donne souvent ce sentiment d’être comblé au-delà de notre imagination

Le rameau de paix est tendu par le pape. Bref, on comprend que tout va bien se passer. Même si l’attente s’éternise. C’est normal, si près du ciel.

Enfin le pape arrive. Il glisse sur son fauteuil avec un sourire en coin. Il paraît diminué mais serein. Aura-t-il la force de lire son discours ? Le saint-père fixe notre petite assemblée et commence d’une voix tranquille, presque chantante malgré la fatigue :

« Je suis heureux de vous rencontrer, vous qui êtes les visages et les cœurs du “Congrès Mission”. Je vous remercie de votre visite et surtout de votre engagement fidèle au service de l’Évangile, source de lumière et d’espérance dans un monde qui en a tant besoin. Alors que vous préparez votre grand rassemblement à Bercy, l’Église vient d’entrer dans une nouvelle année jubilaire qui nous invite à être des “pèlerins de l’espérance”. C’est un appel pressant à renouveler notre vie chrétienne, qui nous envoie en mission : devenir les témoins d’une espérance qui ne déçoit jamais (cf. Rm 5, 5), dans la “joie de l’Évangile qui remplit le cœur et toute la vie de ceux qui rencontrent Jésus” (exhortation apostolique Evangelii gaudium, 1). »

Il faut tendre l’oreille. Le pape parle en italien et mezzo voce. Le principal est de se mettre à son écoute, insiste Gabriel Rochette de Lempdes, président d’Anuncio Mission :

« Depuis le début, nous voulons être au service de l’Église. L’objectif du Congrès Mission ne se limite pas à organiser un gros événement festif. Voir le pape, c’est être attentif à ce que l’Église attend de nous, se remettre entre ses mains. »

François poursuit sa petite exhortation qui tombe à pic en ce matin radieux :

« Chers amis, la joie est inséparable de l’espérance, et elle est aussi inséparable de la mission ; une joie qui ne se réduit pas à l’enthousiasme du moment, mais qui naît de la rencontre avec le Christ et qui nous oriente vers nos frères et sœurs. […] Porter l’espérance, c’est offrir au monde une parole vivante, une parole enracinée dans l’Évangile, qui console et ouvre de nouveaux chemins. »

Le pape reprend son leitmotiv des périphéries. Il est reçu cinq sur cinq :

« Je vous encourage à ne jamais avoir peur de “sortir”, parce que “la mission est une passion pour Jésus mais, en même temps, elle est une passion pour son peuple” (ibid., 268). Cela signifie aller là où les hommes et les femmes vivent leurs joies et leurs peines. »

Pour tous ceux qui bossent toute l’année dans l’ombre de Bercy, le message est réconfortant :

« Merci pour tout ce que vous faites, merci pour votre dynamisme et votre enthousiasme, pour la fraternité missionnaire que vous tissez avec patience et foi à travers la France… »

François marque une pause. Il dit quelques mots en français : « France, la fille aînée de l’Église. Et les ennemis de la France disent : « Oui, la fille aînée de l’Église, mais pas la plus fidèle. » Ce n’est pas vrai ! Que de saints en France : que de saints ! »

Certains vaticanistes sont toujours persuadés que François est fâché avec la France, mais nous ne les croyons pas, évidemment.

François nous demande de poursuivre la route. À fond :

« N’ayez pas peur de répondre à cet appel ! Être missionnaire, c’est se laisser bousculer par l’Esprit Saint. Lisez les premiers chapitres des Actes des Apôtres et voyez ce que fait l’Esprit Saint. C’est l’Esprit qui guide l’Église, qui secoue les cœurs. »

Il ne faut pas stopper de peur d’avoir un accident :

« L’Esprit Saint pousse à la créativité ! Regardez la vie des saints : tous créatifs, parce qu’il y a l’Esprit en eux ! L’Esprit Saint nous invite à annoncer l’Évangile non seulement dans les structures établies, mais aussi là où sont nos frères et sœurs : annoncer l’Évangile dans la vie de tous les jours, dans leurs joies, dans leurs blessures, dans leurs questions. »

François termine son discours en évoquant la jeunesse :

« Aidez les jeunes à découvrir le Christ, car le Christ est la réponse. Aidez-les à grandir dans la foi, à oser des choix courageux et à devenir des disciples missionnaires de Jésus, des témoins vivants de l’Évangile. Transmettez-leur l’audace de rêver d’un monde plus fraternel. »

Cela n’est pas tombé dans l’oreille d’un sourd. Maud et Alex Lauriot-Prévost expliquent :

« Cette rencontre constitue un encouragement. Le pape regarde vers l’avenir, il se projette vers les jeunes générations. Il encourage une transmission des aînés vers la jeunesse. C’est beau d’accompagner des jeunes pour monter de tels événements ! »

Ils terminent avec un large sourire :

« Quand François a reçu la communion Priscille et Aquila, il a souligné le foisonnement missionnaire en France. C’est pour lui un signe de l’Esprit. La France, ce n’est pas uniquement le vin et le fromage, ce sont aussi les initiatives missionnaires ! »

Le pape est au courant.

-Samuel Pruvot

Pour en savoir plus, commandez notre nouveau numéro !

Cet article est issu du magazine suivant :
Couverture Mission13

Revue Mission n°13 – Les néophytes

Depuis l’Antiquité, les néophytes sont le signe de la croissance de l’Église. Ces « nouvelles plantes » continuent de pousser aujourd’hui en France avec la grâce de Dieu. Elles sont de plus en plus nombreuses et variées et bousculent les équilibres de notre vieux jardin catholique. Comment faire grandir les néophytes et comment grandir avec eux ?

Recherche

Rechercher

Articles les plus lus

view
1486

NOTRE MISSION

Mission s’inscrit dans la dynamique de l’événement Congrès Mission pour apporter toute l’année une nourriture solide aux missionnaires qui vont au-devant des Français. Grands entretiens, études sociologiques, reportages, articles bibliques et patristiques, fiches pratiques, débats, interviews de philosophes ou de people : tous les genres journalistiques sont convoqués pour être à la mesure des défis colossaux de la sécularisation.

Mission est aussi une promesse, celle de tisser un grand réseau missionnaire en France et d’installer l’évangélisation dans le quotidien des communautés chrétiennes. La promesse de montrer la beauté de la mission et sa diversité créative.

Articles pouvant vous intéresser
Commentaires

Laisser un commentaire

SE CONNECTER

JE NE SUIS PAS ABONNÉ ?

Abonnez-vous à la revue Mission et accédez à tous les contenus et services du site en illimité !

En poursuivant votre navigation, vous acceptez l’utilisation de cookies dans les conditions prévues par notre politique de confidentialité.