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Culture

Henri Portal

14 mai 2022

Pour Henri, qui a redécouvert le grégorien en renouant avec la pratique, la tradition du plain-chant a la capacité unique de rapprocher les esthètes de la piété populaire, et de faire se rejoindre les chrétiens à travers l’histoire.

Le chant grégorien inspire depuis longtemps de belles remarques aux penseurs et aux écrivains. Beaucoup, comme Simone Weil ou Antoine de Saint-Exupéry, en soulignent la grâce et la majesté, qui semblent d’autant plus précieux à l’heure où le sacré tend à disparaître de nos sociétés. Certains, comme Huysmans, ont même trouvé dans « le chant propre de la liturgie romaine » des ressources susceptibles de les mener au Dieu des chrétiens, conformément à la vocation essentielle du grégorien, qui est de toucher les cœurs et d’élever les âmes, et pas simplement de séduire les sens. Si profonds et si justifiés soient-ils, ces éloges et ces récits ont toutefois pu donner sans le vouloir une image excessivement élitiste de ce répertoire ancien. Ce serait là d’abord une affaire d’érudits ou d’esthètes ; et le commun des fidèles n’y trouverait pas son compte, ou du moins ne parviendrait qu’avec peine à goûter les charmes, il est vrai parfois austères, du plain-chant.

C’est pourquoi, je tiens à rappeler ici combien le grégorien peut être un chant profondément populaire. Bien sûr, les meilleurs musiciens d’entre nous apprécieront plus tel Introït ou tel Graduel ; ils sauront déceler dans ces mélodies complexes et subtiles le génie propre d’un Moyen-âge que l’on a injustement traité d’obscurantiste. Mais n’oublions pas que le grégorien comporte des trésors plus immédiatement accessibles. Il suffit d’entendre les voix d’une assemblée s’unir autour du Gloria des anges ou du Salve Regina pour comprendre que ces hymnes possèdent cet étrange pouvoir de relier le dandy « fin de siècle » et l’homme de tous les jours, sans que ni l’un ni l’autre ne se sentent exclus. Au-delà du cas particulier de la liturgie, j’ai mesuré combien le grégorien avait pu toucher mon épouse, non pratiquante lors de notre rencontre. Afin de mieux suivre la messe en latin où nous allons parfois, nous avons profité du confinement pour apprendre l’ordinaire, le Credo, et les antiennes mariales.

Même si nous sommes loin d’être des chanteurs confirmés, ce programme ne fut pas insurmontable ; et la découverte, ou plutôt l’approfondissement, de ces mélodies nous a aidés à sentir notre cœur battre au rythme de l’Eglise universelle. Peut-être est-ce une forme de naïveté, mais, en chantant « Et cum spiritu tuo », j’ai toujours le sentiment de m’inscrire à la suite des générations précédentes, qui ont répété ces mots, non sans provoquer l’émotion d’athées convaincus, comme Diderot qui ne pouvait voir passer une procession sans pleurer.

Alors que l’appel de la Mission se fait plus insistant, le grégorien a sans doute un rôle à jouer. Loin de nous rétrécir, ou de nous amener à nous replier sur nous-même, ce chant, dont le caractère catholique s’impose à tous comme une chaleureuse évidence, est peut-être le meilleur moyen de nous ouvrir au monde tel qu’il est et de lui annoncer la Bonne Nouvelle sans pour autant l’affadir.

Pour (re)découvrir le grégorien, le conseil d’Henri.

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